memento memori

 

Les présences 3937 (copyright P.Mouillon 2024 )

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Memento memori est une étude prospective, actuellement en cours de développement, qui deviendra publique dans quelques mois, sous une forme hybridant la création contemporaine et la recherche en sciences sociales.

Elle poursuit nos travaux antérieurs autour du vivant et des vitalités, sous un nouvel angle. Car l’art demeure un outil puissant pour recadrer nos vies, les situer à leur juste mesure dans le temps long de l’humanisation et le grand cycle du vivant. Il peut nous aider notamment à admettre combien les générations disparues composent notre matrice, combien nous menons toujours notre vie, accompagné par leurs mots et avec leurs outils. C’est ainsi qu’elles nous socialisent et nous humanisent car elles forment cet humus, ce fonds dont l’étymologie est commune aux mots humain, humanité, inhumé et humilité. Il s’agit d’une fonction sociale vivace, c’est à dire agissante dans le monde des vivants. Aucune civilisation n’existerait sans cette transmission des mots et des savoirs, des symboles et des outils.

Rien de nécrophile dans cette recherche mais, à l’heure de l’anthropocène et de l’effondrement des équilibres écosystémiques, la volonté de questionner et recadrer nos vies, de les situer à leur juste mesure dans le temps long de l’humanisation et dans les dynamiques enchevêtrées du vivant.

 

points de repère

local.contemporain 06 / 80 pages / éditions le bec en l’air

Textes de Patrick Chamoiseau, Bernard Stiegler, Daniel Bougnoux, Yves Citton, Thanh Nghiem, Chris Younes, Jean Guibal, Olivier Frerot, André Micoud, Janek Sowa, Luc Gwiazdzinski, Henry Torgue.

Images de Maryvonne Arnaud, Sylvain Pauchet.

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Déboussolés !

C’est le terme qui s’impose fréquemment pour témoigner de l’incompréhension dans laquelle nous plongent les situations déconcertantes à l’échelle personnelle comme à celle de l’évolution du monde.

L’impression domine que les coordonnées stables qui assuraient un repérage correct et quasi permanent au fil de la vie d’une personne, vacillent et sont mises en doute. Fait nouveau, le monde change plus vite que la conscience individuelle. Les grands systèmes, la famille, le travail, la religion, la politique, l’économie, et même l’argent… s’avèrent des colosses aux pieds d’argile. Que devient-on lorsque les points de repère qui permettent à chacun de s’identifier et de se situer deviennent flottants ? Une époque sans points de repère partagés est-elle viable ?

Un double mouvement s’observe : d’une part, une quête éperdue de balises et d’amarres pour cadrer et référencer une vie symbolique rapiécée, où la consumation des valeurs fait écho à la consommation frénétique des objets ; d’autre part, un flicage effréné de la localisation et de la chronologie de chaque individu, piégé dans le labyrinthe de ses mots de passe, et dont chaque action banale en réseau génère des coordonnées l’épinglant sur la carte inquiétante d’une énigmatique surveillance mondialisée.

Pour comprendre quels sont les repères d’aujourd’hui et quels pôles attirent nos boussoles, ce numéro met en résonance trois ensembles : les lieux-dits d’une région, qui la parlent à leur manière et témoignent de la sédimentation de l’histoire ; les photographies de Maryvonne Arnaud, véritables commentaires visuels, qui expriment sans mots l’appel sensible aux repères ; et une suite de réflexions ouvertes, abordant plus particulièrement trois domaines fondamentaux : le lieu et ses racines ; les objets, la technique et le savoir ; la langue, tradition et traduction.

Toutes ces citations proviennent des débats de l’Atelier-monde, un cycle de rencontres initié par Philippe Mouillon et soutenu par La Criée, centre d’art contemporain de Rennes. Des philosophes, chercheurs, artistes et poètes y débattent librement de ces questions, constituant une « collecte mondiale des doutes », pistes de réflexion éloignées de toute doctrine et fonctionnant plutôt à la manière d’un jeu – dans les deux sens de ce mot : comme exercice ludique et aussi comme la légère mobilité qui permet l’aisance, évitant immobilisme et rigidité.

« Il n’y a pas de vérité première, il n’y a que des erreurs premières, la vérité est une erreur rectifiée » écrit Gaston Bachelard. C’est à l’adoption d’un regard « rectificateur » que voudrait contribuer ce numéro : faire émerger une pensée de la nuance, ne refuser aucun savoir, archaïque ou étranger, intégrer à l’analyse les visions de l’art et les intuitions de la poésie, jusqu’à faire du doute un repère.

Henry Torgue

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