Le travail du lieu

  • multitudes – revue politique artistique philosophique, publie ce printemps 2022 son numéro 86 intitulé Le territoire, une affaire politique
  • Territoire ! Le mot claque comme un drapeau, il est adulé ou soupçonné. Son double pluriel, les territoires, est phagocyté par la campagne électorale. Qu’en est-il de cet objet politique ? Ce numéro tente de l’objectiver, de l’extraire des catégorisations pour donner à voir ses diversités, ses interdépendances, sa profondeur historique, ses ressources. Les agirs spatiaux comptent, et gagneraient à orienter l’action publique et les formes démocratiques. « L’esprit des lieux » inspire l’artiste, définit les milieux à préserver, imprègne nos affects. On vit tous « l’effroyable douceur d’appartenir ».
  • En réponse à cette invitation, Philippe Mouillon développe dans ce numéro l’idée que le travail du lieu est simplement un travail de passeur qui facilite les résurgences de temps et leur acclimatation sociale :

« Le poète, l’artiste, le jardinier ou l’architecte (et tant d’autres, habités de temps profonds) peuvent travailler un lieu en assemblant soigneusement une certaine qualité d’air, de lumières, de vents dominants, en dosant les minéralités, en synchronisant la rencontre entre des individus, une époque, des temporalités et l’enchevêtrement des écosystèmes terrestres… afin de cristalliser une humeur, une atmosphère impalpable, une intensité particulière qui nous porte et nous invite à vivre. 

D’un site à l’autre, mais aussi d’une époque à l’autre des sociétés humaines, d’une étape à l’autre de notre existence propre, les lieux forment la matrice de notre sensibilité et de nos comportements. Ils sont lieux plutôt que rien en ce qu’ils nous apaisent, nous consolent, nous consolident, nous rassemblent, nous relient, nous grandissent. Ils s’inscrivent en rupture avec l’uniforme simplifié de l’abstraction territoriale pour ouvrir en nous un présent décanté de l’instant, où les présences et les absences demeurent, entrelacées sans fin ». 

 

Le précaire, questions contemporaines

local.contemporain 04 / 80 pages / éditions le bec en l’air

Textes de Bruno Latour, Yves Citton, Janek Sowa, Stefano Boeri, Lionel Manga, Henry Torgue, Daniel Bougnoux, Philippe Mouillon

Images de Maryvonne Arnaud.

Chroniques sonores de Laurent Grappe

 

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Nous n’avons pas réellement la géographie mentale qui correspond au monde dans lequel nous vivons aujourd’hui… C’est de ce constat du philosophe Bruno Latour échangé lors de notre première rencontre qu’est né le désir de rendre visibles les mécanismes d’interprétations et de représentations d’un réel qui s’échappe. Cette fragilité des mécanismes de représentation du monde, paradoxe d’une société si gourmande d’images et d’informations, nous avons choisi de l’éprouver en abordant les précarités contemporaines.

Au-delà de l’évidente et douloureuse fragilité sociale, le précaire s’impose en effet aujourd’hui comme l’une des grandes polarités de l’imaginaire social européen en reformulation. Lorsque dans un sondage effectué en France en décembre 2007 plus de 50 % des habitants citent la précarité comme une de leurs angoisses principales, il nous semble en effet que ce qui est craint excède la seule paupérisation.

Pour être en mesure d’habiter le monde, d’agir sur le monde, il est nécessaire de comprendre les mécanismes de production de cette peur contemporaine. C’est à ce travail de (re)composition esthétique du social que sont invités ici artistes et philosophes disséminés en Europe.

Gdansk, Varsovie, Cologne, Milan, Palerme, Paris, Lyon et Grenoble sont les ancrages territoriaux de cette première étape.

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